Qui veut la guerre ne prépare pas la paix


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par Vincent Le Mercier

Vendredi 12 décembre sur France Info, le ministre des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot était invité.
L’écoutant à la radio en même temps que je conduisais, j’ai au moins échappé à son regard halluciné et rougi – qui m’évoque ou bien un lapin atteint de myxomatose ou bien un CRS enragé et violent qui serait amateur d’amphétamines – et à ses rictus inconscients qui trahissent toute l’arrogante agressivité qui émane du personnage, m’évoquant plutôt, cette fois, la babine retroussée d’un chien qui menacerait de mordre alors qu’on s’approcherait trop près de sa gamelle.

Toutefois, les seuls mots du ministre n’ont pas manqué d’être aussi effrayants que son faciès fâché.
Oh ! Il aurait bien voulu que je sois effrayé par «la menace russe» et par le «dictateur Poutine» qui après l’Ukraine envahira probablement les Pays Baltes et la Pologne, avant de traverser l’Allemagne pour débarquer directement à Paris comme en 1814.
Oui parce qu’«un ogre, ça a besoin de manger», disait encore récemment notre président illuminé et rayonnant.
Mais non. Ce qui m’a fait peur, c’est que nous ayons un tel médiocre personnage à la tête de ce qui reste de notre «diplomatie».

Ainsi Barrot qui n’est pas à une contradiction ou à un mensonge près, pose comme un principe le fait que «c’est aux Ukrainiens et à eux seuls qu’il appartient de prendre des décisions qui concernent leur territoire».

C’est pourquoi la «Coalition des volontaires», c’est à dire l’OTAN, est tellement impliquée dans les affaires concernant l’Ukraine :
La Coalition des volontaires s’est réunie jeudi 11 décembre «pour rassembler les capacités militaires qui seront nécessaires pour régénérer l’armée ukrainienne» et «pour installer en Ukraine des capacités militaires qui dissuaderont durablement la Russie d’agresser à nouveau l’Ukraine». «Cette planification est en train d’être finalisée».

«Régénérer l’armée ukrainienne», cela signifie la volonté de voir l’Ukraine dotée d’une armée forte de 800 000 hommes.
Pas mal pour un pays où il resterait environ 38 000 000 d’habitants, chiffre dont j’ignore s’il inclut les populations du Donbass, de Crimée et de «Novorossia» qui se sont exprimées en faveur de leur rattachement à la Fédération de Russie (mais on ne leur demande pas leur avis).

À proportions à peu près égales, la France verrait ainsi son armée être forte d’environ 1,5 millions de soldats, soit 5,7 X plus qu’actuellement !
Voilà qui donne l’échelle de ce que l’OTAN/UE, Merz, Starmer, Macron & Co. recommandent pour l’Ukraine.
Parce que «la paix a un prix», voyez-vous ?

M. Barrot évoque donc la nécessité impérieuse de «renforcer l’armée ukrainienne»alors même que l’un des tout premiers objectifs de l’intervention russe est précisément d’en diminuer le volume afin d’éviter de voir en l’Ukraine (dotée et guidée par l’OTAN) une menace trop sérieuse.

La diplomatie, quant à elle, consisterait à prendre en considération les attendus de l’autre pour parvenir à un compromis acceptable par toutes les parties.

Mais on ne voit pas pourquoi on s’intéresserait à la demande plusieurs fois formulée par la Russie de rétablir une sécurité indivisible en Europe.

Monsieur Barrot devrait plutôt travailler pour une agence de pub, s’il se pense si convainquant.
En tout cas, dans la mesure où il «croit au produit», il ne ferait certainement pas un mauvais commercial.

Mais revenons à l’Ukraine.
On a donc besoin d’un «cessez-le-feu». On en a besoin pour déployer sur le territoire ukrainien des troupes, pour «installer en Ukraine des capacités militaires qui dissuaderont durablement la Russie d’agresser à nouveau l’Ukraine».

C’est vrai qu’on imagine assez aisément que du point de vue russe, voir dans le cadre d’un «cessez -le-feu» l’OTAN déployer des troupes et du matériel de guerre au sol, ou encore voir les États-Unis assurer la surveillance du ciel avec leurs avions, ou encore les Anglais patrouiller en mer Noire, serait plutôt bien accepté. Non ?
Ce sont là toutes les bonnes conditions pour assurer «une paix juste et durable», comme ils disent.

Une paix «qui ne soit pas une capitulation».
Car de tous temps, les perdants des guerres imposent leurs conditions.
C’est certainement ce que dirait Clausewitz dans le cadre – devenu systématique – de l’Inversion !

Mais pourquoi est-il donc si important de «ne pas perdre la face», lorsqu’on n’en a aucune ?
La dernière fois que l’occident atlantiste a respecté les termes d’un traité, même juridiquement contraignant, c’était quand ?
Le Traité ABM ? Minsk 2 et son «format Normandie» ? L’Accord de Vienne sur le nucléaire iranien ? Le Traité FNI ?
Quand on arraisonne des navires en haute mer ? Quand on détruit des pays en se couvrant avec des mensonges ? Quand on méprise l’ONU et ses résolutions ? Qu’adviendra-t-il du Traité New Start en 2026 ?

Qui croit sérieusement qu’il soit encore possible que le «reste du monde» nous prenne au sérieux, ou nous respecte lorsqu’on clame que nous «défendons des valeurs» ?
Quelle importance un tel ministre des Affaires étrangères pense-t-il avoir, au juste, lui dont ni la parole, ni la signature ne valent plus rien ?

La Coalition des volontaires, tout juste réunie à Berlin, recommande encore :

«Investir dans la prospérité future de l’Ukraine, y compris en mettant à disposition des ressources significatives pour la reconstruction et la reprise, des accords commerciaux mutuellement bénéfiques, et en tenant compte de la nécessité pour la Russie de compenser l’Ukraine pour les dommages causés. À cette fin, les actifs souverains russes dans l’Union européenne ont été immobilisés».

M. Barrot sur France Info était raccord :
«Les Européens vont décider de priver la Russie des actifs qui sont aujourd’hui placés en Europe – 200 milliards d’euros – aussi longtemps que nécessaire, jusqu’à ce que la Russie cesse sa guerre d’agression et verse des réparations à l’Ukraine»explique le ministre des Affaires étrangères. «Personne d’autre que les Européens ne pourra toucher à ces avoirs».

et enfin :
«Soutenir fortement l’adhésion de l’Ukraine à l’Union européenne».Mais bien entendu pas forcer une telle adhésion à grands renforts d’ingérences, comme d’ailleurs on ne le fait nulle part, ni en Géorgie, ni en Serbie ni en Moldavie par exemple.
Et bien sûr, le coup d’État organisé en 2014 à Kiev et menant à la guerre en 2022, n’avait rien à voir non plus avec de telles velléités.

Pourquoi faire de l’Ukraine un pont entre l’Europe et l’Eurasie, quand on peut plutôt en faire un mur qui nous en sépare ?
C’est du pur pragmatisme : un mur coûte infiniment moins cher qu’un ouvrage d’art, après tout. Mmm ?

Et puis les anglo-saxons n’auraient jamais toléré que l’Europe puisse être connectée à l’Eurasie, aux ressources de la Russie, à l’Asie, à la Chine et à ses infrastructures des «Nouvelles routes de la Soie» qui promettent d’être le cœur battant du commerce international au XXIe Siècle.
Or satisfaire les anglo-saxons, n’est-ce pas le prix à payer pour avoir la chance de vivre au sein de «l’Europe de la paix» ?

Les Allemands doivent en savoir quelque chose, et tant pis pour les 35 000 licenciements prévus chez Volkswagen, les 13 000 chez Bosch, et les quelques dizaines de milliers d’autres chez tous les sous-traitants, et autres boutiques plus ou moins colossales qui déménagent, ferment des usines ou mettent simplement la clé sous la porte.

Bref.

Ne manquant pas de formuler les éléments de langage adéquats préalablement définis par ses conseillers avisés, le ministre-communiquant admoneste fermement :
«C’est maintenant à Vladimir Poutine de faire le dernier pas et de mettre fin à cette guerre impérialiste et coloniale».
Et Bim ! Prends ça, Vladimir !

Voilà des termes dont on aurait peut-être préféré qu’ils soient plutôt formulés à l’adresse de Benjamin Netanyahou. Mmm ?
Ah mince : hors-sujet. Passons.

J’imagine qu’en matière de guerres liées à l’impérialisme et/ou à la colonisation, le ministre-VRP de l‘OTAN et soutien d’Israël en connaît sûrement un rayon. Ou pas.
Du moment que la prose martiale s’instille bien dans l’espace vide des cerveaux malléables de la masse consentante, on peut tout se permettre.
L’Inversion, c’est quand même bien fait !

Après tout, notre ministre se contente d’être raccord avec les discours ambiants. Il est donc cohérent.
Vous n’avez bien entendu pas manqué les propos de Marc Rutte, le patron de l’OTAN qui appelle Donald Trump»Daddy» :
«Nous devons nous préparer à une guerre de l’ampleur de celle qu’ont connue nos parents et grands parents» ;

ni ceux du général Fabien Mandon, Chef d’état-major des armées, déplorant que les français ne soient pas suffisamment prêts à devoir «sacrifier [leurs] enfants» ;

ni encore ceux du maréchal de l’air et chef d’état-major de l’armée de l’air britannique Sir Richard Knighton, qui se dit d’accord avec notre général Mandon et invite les «fils et filles de la nation» à être prêts à combattre, puisque la perspective d’une guerre contre la Russie se présente de plus en plus comme une «dure réalité».

Tout le monde est donc au diapason. L’idée d’une guerre inévitable est consciencieusement, méthodiquement, à force de répétition, instillée dans les esprits des peuples européens, électeurs-consommateurs par trop épanouis.

Le journaliste de France Info, en bon chien de garde, ne manque évidemment pas de rajouter un peu d’huile sur le feu :
«il y a un côté prime à l’agresseur, d’une certaine façon»
«Est-ce que quand même, ce n’est pas, cette concession ukrainienne, inciter le Kremlin à avoir encore d’autres exigences et peut-être encore d’autres objectifs ?»
Ou encore :
«On apprend effectivement que des pétroliers russes viennent en France. Est-ce que, si c’est légal, c’est pour autant acceptable d’une certaine façon de financer quand même la Russie par ce biais ?»

Sous-texte : «Alors Jean-Noël, tu ne vas quand même pas perdre la face, n’est-ce pas ?»
Un grand merci à ce journaliste du service public pour sa saine contribution au débat clos et unilatéral, et à l’escalade dans laquelle s’enferment tous les pseudo-dirigeants européens.

Pendant ce temps-là en France, à l’exception disons du PRCF ou de Florian Philippot – qui sont pour le moins relativement insignifiants en matière d’influence – aucun parti politique ou syndicat n’appelle – à ma connaissance – à la mobilisation contre les politiques visant à pousser les budgets alloués aux armées, à l’OTAN, aux fabricants d’armes, jusqu’à 5% du PIB d’ici 2035, soit la bagatelle d’environ 140 milliards d’euros par an !

En plein vote d’un budget austéritaire, 6,7 milliards supplémentaires – qui s’ajoutent donc aux 413 milliards déjà approuvés pour la LPM 2024-2030 – viennent d’être votés pour le ministère de la Défense, dont le budget pour 2026 dépassera donc les 57 milliards d’euros.

Tiens toi bien, l’Éducation Nationale ! (qui participe activement, puisqu’on voit fleurir des «classes Défense» dans lesquelles les élèves de 4ème sont invités à s’investir, sans qu’on se questionne trop sur quelle propagande pourrait leur y être martelée).

Les budgets de la Défense d’aujourd’hui ne sont qu’une paille au regard des budgets futurs, finalement.
Mais où donc va-t-on trouver autant d’argent ?
«Il va falloir travailler plus» Haha ! Tu m’étonnes.
Parions que ça ne suffira pas non plus, surtout dans le cadre d’une récession, même bien dissimulée.

Mais toute cette épargne dont vous ne faites rien, tous ces milliers de milliards, là, ça ne vous dérange quand même pas si on se sert un peu, non ? Juste un peu.
On va commencer par gentiment vous inciter à investir dans nos jolis fleurons qui fabriquent des armes made in France, parce qu’après tout n’avoir aucune éthique c’est comme ne pas avoir de face : ça rapporte.
Tout ça c’est parce que «la paix a un prix»et que vous le paierez, de gré ou de force.

En attendant, on parle service militaire, conscription, recrutement des biens et des personnes déjà rendu possible par décret du 1er ministre, discours martial, etc.
Tout passe. Rien ne bouge. Personne ne moufte.

Oh ! On a quand même vu les dockers syndiqués du port du Havre empêcher le chargement de tubes de canons destinés à Israël.
Merci à eux. Mais c’est encore hors-sujet.
Et puis on a surtout remarqué l’absence globale du relais de cette information, surtout par les médias destinés à abrutir et/ou désinformer la masse consentante.

Tout ça pour dire que sans un mouvement d’opposition à la guerre qui soit un tantinet sérieux, préparons-nous à ce que l’OTAN – qui impose aussi bien la ligne éditoriale dominante, que les mots dont use notre «diplomatie» dont l’arrogance imbécile est si bellement incarnée par Jean-Noël Barrot – ne se contente pas seulement de stimuler l’escalade, mais déclenche réellement les hostilités au delà du seuil des «techniques de guerre hybride».

Parce que les pilules de la récession, de la désindustrialisation accélérée induite par l’interdiction que l’UE, en vassale zélée, s’inflige à elle-même d’accéder à de l’énergie abondante et peu chère ;
et aussi celles du chômage, de la pauvreté, de la misère même qui en résultent, devront être par nous avalées à tout prix.

Quelques pilules bien amères parmi d’autres.
Celle du transfert jamais vu et de l’accaparement quasi-total de la richesse par une infime élite ploutocratique cupide, criminelle et dangereusement sectaire, portant les inégalités et l’injustice à des sommets d’inhumanité qui crèvent la stratosphère, en est une autre.

Et c’est le totalitarisme technocratique, outil du fascisme financier lui-même dissimulé sous les oripeaux de «la démocratie», qui fera office du verre d’eau facilitant la déglutition de toute cette saine pharmacopée.

«Quoi qu’il en coûte» ça passe crème, à partir du moment où «nous sommes en guerre».
Vous vous souvenez ?
Mais je ne voudrais pas faire trop long en expliquant pourquoi il y a bel et bien un rapport entre ces propos de mars 2020, et ceux qu’on entend aujourd’hui.
Les acteurs, comme les objectifs, sont finalement les mêmes.

Où donc sont les cortèges qui montrent que l’opposition à la guerre et au totalitarisme existe ?
Que font nos soi-disant «représentants» ?
Est-ce qu’appeler à la paix et refuser férocement l’escalade et la guerre, a un prix ?
En tout cas, persister à ne pas le faire aura un coût.



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