UE-Mercosur en crise : Paris menace de veto, Rome juge une signature prématurée, la CE annonce un report


Tensions à Bruxelles en dehors des quartiers de l’Union européenne, où des milliers d’agriculteurs ont protesté contre l’accord de le libre échange UE-Mercosur, et à l’intérieur, où les dirigeants d’États membres réitèrent fermement leur opposition à une signature ce weekend au Brésil. Le président Emmanuel Macron a lui menacé de ne pas signer l’accord si la CE tentait un” passage en force”, demandant un report de la signature. Une position à laquelle s’est jointe Giorgia Meloni. Quant à Urusula von der Leyen, elle annoncait Jeudi soir aux dirigeants le report de la signature de l’accord.

Théâtre depuis des mois de vives tensions, le Parlement européen a clarifié sa position mardi 16 décembre. Les discussions des eurodéputés sur l’accord UE-Mercosur se sont soldées par un vote adoptant à 431 voix pour, 161 contre et 70 abstentions un règlement renforçant les clauses de sauvegarde. 

Lula pose un ultimatum à l’UE

Ce règlement prévoit concrètement une suspension temporaire des préférences tarifaires sur des produits agricoles sensibles (bœuf, volaille, sucre) importés d’Argentine, Brésil, Paraguay et Uruguay en cas de préjudice grave aux producteurs européens. Les seuils d’activation ont été abaissés à 5 % d’augmentation des importations ou de baisse des prix sur trois ans, contre 10 % proposé par la Commission européenne (CE). Les délais d’enquête raccourcis de six à trois mois, ou de quatre à deux pour les produits sensibles. Le règlement prévoit une obligation de réciprocité imposant à Mercosur de respecter les normes UE en matière phytosanitaire, environnementale et sanitaire.

Le vote devait intervenir la veille du sommet européen, qui se déroulait du jeudi au vendredi. Les dirigeants des États membres devant donner leur accord. Ursula von der Leyen, présidente de la CE, a insisté ce jeudi 18 décembre à Bruxelles sur l’urgence de ce feu vert, à deux jours du sommet Mercosur, prévu le 20 décembre 2025 au Brésil. 

La pression est à son comble. Outre la détermination des agriculteurs européens, qui manifestent par milliers à Bruxelles, l’opposition de plusieurs États membres et les exigences du Parlement européen, lui-même divisé ces derniers mois concernant la question, la CE subit depuis mercredi un ultimatum du président brésilien Luiz Inácio Lula da Silva. Il affirme que “si l’accord n’est pas signé [lors du sommet à Foz do Iguaçu], le Brésil mettra fin aux négociations pour le reste de [son] mandat », et a accusé l’Europe de “ne pas assumer ses responsabilités après 25 ans de discussions et des concessions maximales de Mercosur”. 

Menaçant de se tourner vers d’autres partenaires comme le Japon ou l’Inde, il a qualifié le moment de “maintenant ou jamais” soulignant que son pays ne tolérera plus les “caprices européens” qui freinent un pacte essentiel pour l’économie sud-américaine.

Macron et Meloni obtiennent le report

Quant à la France, elle maintient un refus catégorique. Le président français Emmanuel Macron a réaffirmé jeudi que “les conditions ne sont pas remplies pour signer l’accord en l’état”, malgré des améliorations sur des causes de sauvegarde. Il a insisté sur la nécessité “de clauses de sauvegarde solides, de réciprocité et de contrôle pour préserver la sécurité alimentaire et les producteurs européens”. 

“Si aujourd’hui il y a une volonté de passage en force, je vous le dis très clairement, la France s’opposera”, a-t-il martelé. “Le compte n’y est pas, cet accord ne peut pas être signé en l’état et on doit être respectés”. “Personne ne peut ignorer ce que je viens de vous dire”, a-t-il poursuivi, disant en appeler à son “bon sens un peu paysan. je n’aime pas qu’on balade les gens, donc je ne vais pas balader nos agriculteurs”.

L’Italie, elle, rejoint ce front du refus. Devant la Chambre des députés, la Première ministre Giorgia Meloni a rappelé que “le gouvernement italien a toujours dit que l’accord doit être avantageux pour tous les secteurs et qu’il est essentiel de répondre aux préoccupations de nos agriculteurs”. De son avis, “il serait prématuré de le conclure sans protections supplémentaires et des garanties de réciprocité adéquates pour l’agriculture”. 

Meloni, alignée sur Paris et Varsovie, a ajouté : “Cela ne signifie pas que l’Italie veut bloquer ou contester l’ensemble de l’accord”. Elle critique les contrôles proposés, les estimant “insuffisants pour assurer une concurrence loyale”. Une opposition soutenue par des manifestations d’agriculteurs à Rome.

Les deux dirigeants ont ainsi plaidé pour un report de la signature du traité. Dans la soirée du jeudi, Lula da Silva a indiqué qu’il transmettrait une requête de Giorgia Meloni, à savoir repousser la signature de l’accord de libre-échange. Giorgia Meloni “m’a demandé si nous pouvions avoir la patience, d’une semaine, dix jours, un mois, l’Italie soutiendra l’accord”, concluait-il, faisant part de son intention de transmettre le message à Mercosur pour connaître leur position. 

Face à une telle opposition, la CE s’est résignée, Ursula von der Leyen annonçant aux dirigeants le report de la signature, tout en se disant “confiante » pour un accord en janvier. Un échec pour l’exécutif européen, l’Allemagne et l’Espagne, très favorables à l’accord. 





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