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Grâce aux platanes, ils mesurent les particules fines de leur banlieue


19 avril 2024 à 16h41
Mis à jour le 19 avril 2024 à 17h52

Durée de lecture : 3 minutes

Montreuil (Seine-Saint-Denis), reportage

Sous une pluie intermittente, un petit groupe se forme autour d’un platane qui borde le boulevard Rouget de Lisle, à Montreuil. Marine, membre du collectif écoféministe Voix Déterres, détache délicatement quelques bouts d’écorce avec un sac de congélation en guise de gant. Après avoir soigneusement chassé l’air pour bien sceller le sachet, elle le numérote et le pose sur son vélo avant d’attaquer l’arbre suivant.

La jeune femme de 24 ans participe ce 17 avril à la campagne de sciences participatives ÉcorcAir. Le but ? Mesurer la quantité de particules fines présentes sur des écorces de platanes afin d’analyser la qualité de l’air en ville.

Marine détache un bout d’écorce de platane avec un sac de congélation pour ne pas risquer de contaminer l’échantillon.
© Jeanne Bourdier / Reporterre

« Ces arbres, très fréquents en milieu urbain, ont la particularité de perdre leur écorce tous les ans, explique Christine Frankie, enseignante-chercheure à l’École des Mines venue soutenir la collecte. Nous pouvons donc savoir précisément quelle quantité de particules fines s’y dépose chaque année. »

La campagne participative ÉcorcAir, lancée en 2016 par plusieurs universités et centre de recherches, a permis de dessiner une cartographie de la pollution de différentes villes en France et à Berlin. Une campagne avait été menée à Paris entre 2016 et 2019. Elle avait montré la diminution de la quantité de particules fines au niveau des voies sur berges de la Seine après la suppression des voies de circulation automobile.

De gauche à droite : Marine, Christine Franke et Christian, lors de la campagne de sciences participatives ÉcorcAir à Montreuil.
© Jeanne Bourdier / Reporterre

En 2023, c’est à Amsterdam que des échantillons ont été récoltés. « Les données sont encore en cours d’analyse. On a pris du retard, car on ne s’attendait pas à avoir autant de participations ! », se réjouit Christine Franke.

S’approprier son quartier par les sciences participatives

Quelques platanes plus tard, l’échangeur autoroutier de Bagnolet, objectif final de la collecte, apparaît aux trois participants. Sous l’œil attentif de Christine Franke, Christian, également membre de Voix Déterres, s’applique à calculer avec précision la distance qui sépare un platane de la chaussée, avant de prélever à son tour un échantillon.

Les participants se familiarisent avec le protocole scientifique fourni par Écorcair et remplissent une fiche de terrain.
© Jeanne Bourdier / Reporterre

« Nous habitons pour la plupart en Seine-Saint-Denis, près du périphérique, où les mesures de la pollution de l’air sont beaucoup moins fréquentes qu’à Paris. C’est un moyen pour nous de mettre en évidence la pollution de l’air de nos banlieues. » Le dernier diagnostic de la qualité de l’air à Bagnolet par Airparif, l’organisme de surveillance de la qualité de l’air à Paris, remonte à décembre 2017.

Pour le sexagénaire, s’intéresser à la qualité de l’air à Bagnolet et Montreuil, c’est aussi un clin d’œil à l’association d’écologie populaire Verdragon qui dénonçait entre autres la pollution subie par les enfants bagnolétais.

À ses côtés, Marine, le mètre à la main, peine à enlacer un platane pour en mesurer la circonférence. « C’est aussi une manière de nous approprier l’espace urbain. En tant que femme, je n’ai pas l’habitude de m’attarder sous l’échangeur [de Bagnolet]. Aujourd’hui, j’y ai ma place, je participe à une action concrète en lien avec l’écologie et qui a du sens pour moi. »

En 2022, pas moins de 1 088 échantillons ont été prélevés et ont permis de quantifier les particules fines sur l’écorce des platanes dans de nombreuses zones. Pour les prochains résultats, il faudra attendre l’automne 2024.


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