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Depuis quelques années, nous avons assisté, dans de nombreux théâtres, à la fois à une inflation de nouvelles technologies et à une mise en scène de ce que ces technologies disent de nos vies. À la fois sujet et outils, ces technologies ont contaminé beaucoup de scènes contemporaines, parfois pour le meilleur, mais aussi quelques fois pour le pire.
Le théâtre contemporain est-il alors aujourd’hui incertain de ses fondamentaux ? Cherche-t-il à pallier certains manques ? Est-il simplement plus curieux d’autres formes artistiques allant du cinéma au jeu vidéo ? Faut-il interpréter ces percées technologiques comme une volonté de renouveler les formes et d’élargir les mises en scène ? Et à quelles conditions la convocation de telle ou telle technologie permet-elle un dispositif immersif inédit ou une mise en récit particulière, et non seulement les connivences ou les identifications liées à des outils contemporains ?
On se pose aujourd’hui ces questions et quelques autres à partir d’une pièce impressionnante, Le Ring de Katharsy, d’Alice Laloy, qui était visible ces jours-ci au Théâtre de Gennevilliers dans le cadre du Festival d’automne et part ensuite en tournée.
Mais on évoque aussi des mises en scène plus anciennes, qui seront toutefois encore visibles en 2025, en particulier Daddy, de Marion Siéfert, et Contes et légendes de Joël Pommerat. Ainsi que Nina, de la compagnie italienne Fanny et Alexander, qui est toujours à l’affiche au Théâtre 14 à Paris.
Le Ring de Katharsy, qui servira aujourd’hui d’embrayeur à notre discussion, est le titre étrange de la dernière création de la marionnettiste plasticienne et metteuse en scène Alice Laloy.
Dans un décor où tous les objets et les humains sont recouverts d’une pellicule grise, un ring est délimité au sol. En quatre tableaux, des avatars humanoïdes s’affrontent selon les codes d’un jeu vidéo ou d’un match de catch, encouragés et guidés par deux joueurs, tandis que les affrontements, modifiés par des objets massifs qui tombent à chaque intermède du plafond, s’avèrent de plus en plus cruels et violents.
La pièce fonctionne comme une loupe à la fois grossissante et ultra-précise sur nos habitudes de consommation et nos disponibilités à la manipulation, et invente pour cela une forme inédite portée par une chorégraphie millimétrée des acteurs et des actrices et une mise en scène mobilisant une gamme étendue de pratiques et de disciplines : musique, danse, marionnette, jeu vidéo, sport, théâtre…
Le Ring de Katharsy était visible au Théâtre de Gennevilliers dans le cadre du Festival d’automne pendant ce mois de décembre, puis il part en tournée à Lille, Tours, Malakoff, Orléans ou Limoges, entre janvier et avril 2025.
Avec :
- Caroline Châtelet, qui écrit pour Sceneweb et le trimestriel Théâtre(s) ;
- Zineb Soulaimani, que vous pouvez lire dans la revue Mouvements, dans Le Quotidien de l’art et dont vous pouvez aussi écouter le podcast « Le Beau Bizarre » ;
- Vincent Bouquet dont vous pouvez retrouver la plume sur ScèneWeb.
« L’esprit critique » est enregistré par les équipes de Gong et réalisé par Karen Beun.