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Prix des aliments et du train, qualité de l’air… Comment l’Europe façonne nos vies quotidiennes


Il faut le reconnaître, les élections européennes ne sont pas celles qui font le plus vibrer les Français. Est-ce l’impression de distance avec Bruxelles, ou l’incompréhension du fonctionnement des institutions ?

Dans tous les cas, l’échelon européen est pourtant essentiel. Les votes des futurs députés européens pourront influer dans de nombreux domaines de notre vie quotidienne. Voici quelques exemples.

1 – L’alimentation

C’est l’un des leviers les plus importants de l’Union européenne : la politique agricole commune, connue sous le petit nom de PAC. Ne vous y méprenez pas, même si vous n’êtes pas agriculteur ou agricultrice, ce dispositif vous concerne !

La PAC représente un tiers du budget de l’Union européenne. Neuf milliards d’euros sont distribués aux agriculteurs français chaque année. Les aides sont actuellement versées en fonction du nombre d’hectares des fermes, quand certains partis — comme Les Écologistes, La France insoumise et le Parti socialiste/Place publique — réclament la mise en place de subventions intégrant des critères d’emploi, sociaux et environnementaux.

Ainsi, les plus petits producteurs français seraient mieux rémunérés, et mettraient sur le marché des aliments sains, dont la production n’aurait pas nécessité trop de pesticides et d’engrais chimiques. Bref, loin de ce qui a été voté en urgence, fin avril, par la majorité des députés européens actuels. « C’est une PAC libérale qui pousse à l’agrandissement des fermes et ne garantit pas le revenu des agriculteurs », résumait à Reporterre l’eurodéputé socialiste Christophe Clergeau.

La nouvelle composition du Parlement européen peut donc avoir des conséquences concrètes, dans les années à venir, sur le contenu de nos assiettes. Les députés peuvent par exemple abaisser le montant des taxes (et donc le prix) de certains produits alimentaires ; mettre en place un étiquetage pour promouvoir les produits sains et de proximité ; valider (ou non) les importations de maïs ou de soja transgénique ; voter les autorisations ou la régulation de nouvelles techniques OGM ; le développement ou la sortie des pesticides ; la poursuite ou la limitation du libre-échange…

2 – La santé

Un autre levier — et pas des moindres — de l’Europe : la santé. « Les États-membres estiment qu’environ 70 à 80 % de leur législation sur l’environnement et la santé est dérivée de l’Union européenne », souligne Faustine Bas-Defossez, directrice Nature, santé et environnement du Bureau européen de l’environnement. Un exemple ? « S’il n’y avait pas l’Europe, on n’aurait pas de protection de notre eau potable aujourd’hui », affirme-t-elle.

C’est effectivement au niveau européen qu’une directive eau potable fixe des seuils de protection, eux-mêmes basés sur des recommandations de l’Organisation mondiale de la santé. Ainsi, qu’on veuille s’abreuver dans les Pyrénées, en Grèce ou en Slovénie, on est assuré de trouver une eau qui répond aux mêmes critères de qualité.

De la même façon, l’Europe fixe des objectifs de seuils à ne pas dépasser concernant la pollution de l’air et la pollution sonore — des nuisances qui provoquent chaque année des milliers de décès prématurés. Mais la mise en application de ces directives européennes laisse encore à désirer. La France, particulièrement mauvaise élève, ne respecte toujours pas la directive sur la qualité de l’air, et se fait souvent rappeler à l’ordre par les institutions européennes.

« Sans l’Europe, les seuils de pollution de l’air seraient encore pires que ce qu’ils sont aujourd’hui en France », estime malgré tout Faustine Bas-Defossez. Même chose pour la pollution aux nitrates en Bretagne. « Si l’Europe décidait de durcir sa législation sur les pollutions pour obliger les États, ce serait une avancée très importante », pense aussi Géraud Guibert, président de la fondation La Fabrique écologique.

3 – Les moyens de transport

Si vous rêvez de voyager de façon bas-carbone cet été, c’est bien à l’Europe qu’il faut vous adresser ! « Le niveau européen permet une ambition bien supérieure au niveau national », juge Géraud Guibert. Certes, si vous comptez partir de Lille pour aller bronzer à Biarritz, l’échelon européen n’est pas plus utile que ça. Mais si vous avez soudainement envie de découvrir la Sicile, sans avion et sans dépenser une fortune, c’est là que cela devient intéressant.

« C’est au niveau européen qu’il peut y avoir une régulation du trafic aérien sur les lignes européennes, une taxation du kérosène [pour rendre l’avion plus cher et moins attractif que le train], un plan d’investissement du ferroviaire, énumère Géraud Guibert. Les États et les compagnies de chemin de fer ont aussi un rôle à jouer, mais l’Europe doit mettre en œuvre cette logique générale. »

Dans un épais rapport publié début mai, une coalition d’organisations écolos a listé des améliorations que l’Europe pourrait mettre en place. « Une loi européenne sur la billetterie qui facilite[rait] la réservation des connexions transfrontalières » serait déjà un bon début, estiment-elles, accompagné d’« un financement supplémentaire pour moderniser les lignes ferroviaires ».

Sans parler de voyage, le développement du train pourrait également être une opportunité pour développer le fret — soit le transport quotidien de nos multiples marchandises — et réduire la pollution atmosphérique et sonore des passages de camions.

Et si tout ça était mis à la poubelle ?

Depuis quelques mois, les partis de droite et d’extrême droite se sont mis à torpiller les textes du Pacte vert qu’il restait à négocier. Cet ensemble de textes sur l’écologie doit permettre à l’Europe de respecter l’Accord de Paris et d’enrayer l’effondrement du vivant, mais il est vivement critiqué par certains partis depuis la guerre en Ukraine et la crise du monde agricole. À l’approche des élections, les droites et extrêmes droites font de la politique de protection de l’environnement et des êtres vivants la responsable de tous les maux, en feignant d’oublier qu’il s’agit d’enjeux essentiels, si l’on veut garantir des conditions de vie dignes et l’habitabilité sur Terre.

« Le risque de ces élections est qu’émergent des coalitions qui s’opposent à des textes ambitieux, comme cela s’est fait sur la loi pour la restauration de la nature, par exemple », craint Géraud Guibert. « On a un avant-goût de ce qui peut se passer si les sondages disent vrai [ils estiment que le Rassemblement national, parti d’extrême droite, pourrait obtenir plus de 30 % des suffrages], poursuit Faustine Bas-Defossez. Si une majorité de conservateurs et de partis d’extrême droite était élue, la menace d’un retour en arrière serait très forte, sur les questions d’environnement et de santé. »



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