Donald Trump poursuit méthodiquement son travail de sape de l’action environnementale. Le 12 mars, son administration a frappé un grand coup, en annonçant le démantèlement de 31 règlementations parmi les plus importantes du pays.
« Nous enfonçons un poignard droit dans le cœur de la religion du changement climatique afin de faire baisser le coût de la vie des familles américaines, libérer l’énergie américaine, ramener les emplois du secteur automobile aux États-Unis et bien plus encore », s’est félicité le directeur de l’Agence étasunienne de protection de l’environnement (EPA), Lee Zeldin, dans une allocution vidéo.
Centrales à charbon, voitures, eau…
Parmi les mesures de protection de l’environnement visées : une règle exigeant que les centrales à charbon éliminent la quasi-totalité de leurs émissions de CO2 grâce aux technologies de captage de carbone, adoptée en 2024. Applaudie par les organisations écologistes, cette règle, qui devait s’appliquer à partir de 2032, aurait selon le gouvernement de Joe Biden permis d’empêcher l’émission de près de 1,4 milliard de tonnes de CO2 d’ici 2047, soit l’équivalent des émissions annuelles du secteur de l’électricité aux États-Unis en 2022.
Conspuant des règles « étouffantes », qui restreindraient « quasiment tous les secteurs » de l’économie et coûteraient « des milliards » à la population, Lee Zeldin a annoncé vouloir revenir sur des normes relatives aux émissions des voitures et des camions, dont l’entrée en vigueur était prévue pour 2027.
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L’ancien sénateur de l’État de New York a également promis d’assouplir les limites des émissions de mercure des centrales électriques, pourtant associées à des troubles du développement chez les enfants. Il a également fait le vœu de se débarrasser d’une règle obligeant les États à lutter contre leur pollution lorsqu’elle est transportée par les vents vers les États voisins.
Plus inquiétant encore : Lee Zeldin souhaite annuler un avis juridique de 2009, le « constat de mise en danger » (« endangerment finding »), qui affirme que l’augmentation des émissions de gaz à effet de serre constitue un danger pour la santé publique, et qui donne à l’EPA le pouvoir de règlementer les émissions de gaz à effet de serre. Si cet avis juridique devait être annulé, l’EPA verrait ses pouvoirs de lutte contre le changement climatique quasiment réduits à néant.
La biodiversité est également dans le viseur. Lee Zeldin envisage de redéfinir ce qui est entendu par « eaux des États-Unis » dans la Loi sur la protection de l’eau (« Clean Water Act »). Selon le groupe de défense de l’environnement Earthjustice, cité par France 24, la nouvelle définition envisagée priverait de protection des dizaines de millions d’hectares de zones humides et des millions de kilomètres de petits cours d’eau.
« Aujourd’hui, la nouvelle arnaque verte prend fin », a conclu Lee Zeldin, avant de promettre que l’EPA prendrait désormais « sa part » pour « inaugurer l’âge d’or de la réussite américaine ».
« Le jour le plus désastreux de l’histoire de l’EPA »
Ces annonces ne font pas encore loi. Dans la majorité des cas, l’EPA devra se soumettre à un processus de consultation publique avant de pouvoir définitivement enterrer les règlementations visées, précise le New York Times. Il devra également justifier de la nécessité économique et environnementale de revenir sur ces règles.
Ces prises de position confirment néanmoins le caractère écocidaire du projet politique de l’administration Trump. Ces décisions interviennent peu après l’annonce de l’EPA de fermer ses bureaux chargés de la lutte contre l’injustice environnementale. Ces derniers s’efforçaient depuis des décennies de limiter la pollution affectant les populations défavorisées, qui vivent souvent à proximité d’installations polluantes (autoroutes, centrales électriques, usines, etc.) mettant leur santé en danger. Lee Zeldin a également mis fin à l’octroi de 20 milliards de dollars (environ 18 milliards d’euros) de subventions destinées à lutter contre la crise climatique, en invoquant le « risque de fraude ».
« Une menace pour nous tous »
Réagissant dans le Guardian aux plus récentes annonces de Lee Zeldin, Gina McCarthy, ancienne administratrice de l’EPA sous Barack Obama, a qualifié le 12 mars de « jour le plus désastreux de l’histoire de l’EPA ». « L’annulation de ces règles n’est pas seulement une honte, estime-t-elle, c’est une menace pour nous tous. L’agence a totalement renoncé à sa mission de protection de la santé et du bien-être des Américains. »
En donnant pour but à l’EPA de « réduire le coût d’achat d’une voiture, du chauffage d’une maison ou de la gestion d’une entreprise », Lee Zeldin dénature radicalement sa mission, relève le New York Times. À sa création en 1970, elle avait pour vocation d’étoffer les connaissances scientifiques sur l’environnement, et mettre en place de nouvelles normes sur la pollution de l’air, de l’eau, des déchets, des radiations et des pesticides. L’EPA n’a « aucune obligation de promouvoir l’agriculture ou le commerce, mais seulement l’obligation cruciale de protéger et d’améliorer l’environnement », précisait son premier directeur, William Ruckelshaus. Un noble objectif, devenu un lointain souvenir.
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