des personnalités politiques et une femme d’affaires philosophe


Le 20 février 2019, lors du dîner organisé par le Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF), le chef de l’État français, Emmanuel Macron s’est engagé à intégrer dans les textes de référence une nouvelle définition de l’antisémitisme élargie à l’antisionisme tout en affirmant que : « l’antisionisme est une des formes modernes de l’antisémitisme ». (1)

Six ans plus tard, à l’initiative du Collectif Nous vivrons, dans un appel édité dans une tribune du Monde du 21 mars 2025, signé par des personnalités éminentes, la même idée refait surface dans les termes suivants : « pour que l’antisionisme ne serve plus de prétexte à l’antisémitisme, c’est à la République de protéger les juifs en intégrant dans sa loi l’antisionisme comme nouvelle forme d’antisémitisme. » (2)

Ces éminentes personnalités n’omettent pas de préciser qu’elles sont « pour la coexistence de deux Etats démocratiques. » (2)

Entre parenthèses et sans mettre en doute leur souhait de l’existence de deux Etats, la réalité géopolitique proche orientale semble leur échapper complètement. Aussi, il est plus judicieux de rester dans l’ Hexagone et de disserter sur les causes qui entraînent ces personnalités à appeler à l’inscription de l’antisionisme politique dans la loi comme étant de l’antisémitisme. Les signataires de l’appel ne remettent pas en cause le sionisme politique mais l’instrumentalisation de l’antisionisme à des fins d’ antisémitisme. Or pour que cet antisémitisme soit avéré à travers une expression antisioniste, il faut le démontrer et non supposer que telle manifestation antisioniste est nécessairement antisémite. Et sur ce point, la justice est armée pour établir les preuves d’un tel état de fait.

A partir de la définition de sémitisme et de sionisme politique (cf ci-dessous), introduire une équivalence entre antisémitisme et antisionisme politique est d’une incohérence évidente.

Dans leur appel, ces personnalités de premier rang font penser à un médecin qui, pour éviter à son patient les probables effets secondaires, refuse de lui prescrire le seul médicament adéquat pour le guérir. Autrement dit, si l’antisionisme politique est interdit par la loi cela revient à interdire la solidarité avec le peuple palestinien, victime depuis 107 ans du sionisme politique.

Animés de bonnes intentions, nos éminentes personnalités ne réalisent pas qu’elles appellent ainsi à l’introduction d’une incohérence dans la loi au nom de la loi. En effet, l’antisémitisme est un mal mais, pour le combattre, encore faut-il exiger du citoyen d’ignorer l’existence d’un autre mal, le sionisme politique, dont est victime le peuple palestinien ?

A cette remarque, les signataires de la tribune rétorquent que ce n’est pas une raison suffisante pour que « tout juif soutenant le sionisme devient coupable… » (2) et dans un élan de bonté et de générosité, ces éminentes personnalité ajoutent : « ni antisionisme ni suprématisme, nous reconnaissons les mêmes droits à tous les peuples. » (2)

Ainsi, les signataires semblent animés par une générosité sans frontière mais, pour les croire, il faut être un ignorant. C’est-à-dire ne pas savoir qu’un sioniste politique a pour rôle de coloniser la terre de l’autre. Et il s’avèrent que cet autre n’est pas juif. Il est palestinien.

Toujours est-il que nos éminentes personnalités semblent ignorer deux définitions qui sont la cause de l’incohérence véhiculée dans leur appel. Une incohérence enveloppée dans un humanisme bon tein qui cachent mal leurs engagements sans faille au côté d’un Etat génocidaire.

Condamner le drame du 7 octobre 2023 n’empêche pas de dénoncer le génocide et la colonisation que vit le peuple palestinien depuis belle lurette.

Définition 1 : Antisémitisme

Racisme dirigé contre les juifs (Définition Larousse)

Sur ce point, l’État français a légiféré et à inscrit dans le marbre la loi condamnant l’antisémitisme. Et le racisme, en général.

Définition 2 : Sionisme politique

« Le Sionisme politique aspire à la création, en Palestine, pour le peuple juif d’un foyer garanti par le droit public… » (3) (Congrès de Bâle :1897).

Un souhait exaucé le 16 novembre 1917 par Lord Balfour, ministre des Affaires étrangères britannique dans des termes qui véhiculaient déjà le double langage : « le gouvernement de Sa Majesté envisage favorablement l’établissement d’un foyer national pour les Juifs et fera tous les efforts possibles en vue de faciliter la réalisation de cet objectif, étant bien entendu que rien ne sera entrepris qui puisse causer un préjudice aux droits civils et religieux des communautés non juives existant en Palestine ou aux droits et au statut politiques dont jouissent les Juifs dans n’importe quel autre pays. » (3)

Pour conclure, une invitation gratuite aux signataires de l’appel : méditer le conseil du résistant maghrébin Emir Abdelkader, mort exilé en 1883 en Syrie après sa résistance face à un autre colonialisme : « ne demandez jamais l’origine d’un homme ; interroger plutôt sa vie, son courage, ses qualités et vous saurez ce qu’il est. Si l’eau puisée dans une rivière est saine, agréable et douce, c’est qu’elle vient d’une source pure. » (4)

Et afin d’avoir une idée claire de ce qui se trame en géopolitique au XXIe siècle, il est fort conseillé aux éminents signataires de la tribune de lire le livre de l’historien sioniste Yohanan Manor (3) où il cite Naguib Azoury, écrivain maronite libanais et ancien adjoint au gouverneur de Jérusalem (1905) : « Deux phénomènes importants, de même nature et pourtant opposés, qui n’ont encore attiré l’attention de personne, se manifestent en ce moment dans la Turquie d’Asie : ce sont le réveil de la nation arabe et l’effort latent des Juifs pour reconstruire sur une grande échelle l’ancienne monarchie d’Israël. Ces deux mouvements sont destinés à se combattre continuellement jusqu’à ce que l’un d’eux l’emporte sur l’autre. Du résultat final de cette lutte entre ces deux peuples représentant deux principes contraires, dépendra le sort du monde entier. » (3)

Aujourd’hui, nous vivons dans ce monde annonçé par Naguib Azoury, témoin de l’existence d’un peuple à qui les puissances civilisées dont l’Etat d’Israël veulent faire subir l’histoire du peuple amérindien avec le consentement tacite d’Etats arabes soumis.

M. El Bachir, (24/03/2025)

[1] https://www.elysee.fr/emmanuel-macron/2019/02/20/antisemitisme-plus-jamais-ca

(2)https://www.lemonde.fr/idees/article/2025/03/21/pour-que-l-antisionisme-ne-serve-plus-de-pretexte-a-l-antisemitisme_6584276_3232.html

(3) Yohanan Manor : Naissance du sionisme politique. Collection Archives dirigée par Pierre Nora et Jacques Revel. Edition Galimard Julliard.

(4) Bruno Etienne et François Pouillon : Abd el-Kader, le magnanime. Découvertes Gallimard-Institut du Monde Arabe. 2003





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