La méthode suivie par ces médias a été d’omettre complètement la vaste feuille de lutte pacifique et de résistance non violente de la part du peuple palestinien, d’une part, tandis que les cas d’actes violents sont dramatisés et amplifiés d’autant plus s’ils sont pour certains, apparemment, “inexplicables et sortis de nulle part”, comme les horribles attaques du Hamas le 7 octobre dernier. Joseph Goebbels a dit qu ’”un mensonge répété mille fois devient une grande vérité” (1).
Le conflit israélo-palestinien (faute d’un meilleur terme) n’a pas débuté le 7 octobre 2023, et la volonté des groupes armés palestiniens de recourir à la violence n’est pas le seul obstacle à la paix. Au cœur de cette tragédie insoluble se trouve l’incapacité d’une puissance coloniale et occupante (et de ses facilitateurs) à accepter le rejet par un peuple de son assujettissement et sa détermination à le combattre. Quelle que soit la forme prise par cette résistance – et cela inclut une longue histoire de non-violence et de désobéissance civile, ainsi que de lutte armée-Israël a répondu par un usage disproportionné de la force et sans tenir compte du coût humain (2).
Les médias occidentaux se sont trop souvent concentrés sur la lutte armée palestinienne, de Septembre noir à la présence armée de l’OLP au Liban, en passant par les attentats suicides de la fin des années 1990 et du début des années 2000, la Deuxième Intifada et les plus récentes attaques de missiles du Hamas contre Israël. Cependant, il est souvent complètement ignoré que, depuis le tout début, la résistance non violente a été la forme fondamentale de la lutte des Palestiniens pour la liberté, afin que les médias pro-capitalistes et pro-sionistes puissent les présenter à l’opinion publique mondiale (avec beaucoup plus d’emphase sur les États-Unis.) en tant que personnes violentes et bestiales, avec lesquelles les négociations politiques et diplomatiques sont exclues et qui, de toute façon, ne rempliraient pas ce qui a été convenu. Je veux continuer en mentionnant certains des moments les plus importants de cette lutte pacifique et de la résistance non violente du peuple palestinien.
En 1972, le Conseil national palestinien a décidé que le site de la lutte pour l’autodétermination palestinienne devrait inclure la Cisjordanie et la bande de Gaza. L’année suivante, le Front national palestinien (FNP), une organisation inclusive, clandestine et autonome, avait vu le jour dans les territoires occupés. Ses principales tâches consistaient à coordonner des grèves et des manifestations non violentes dans toute la Cisjordanie et la bande de Gaza pour protester contre le régime israélien et réaffirmer les demandes palestiniennes d’auto-représentation.
Israël a répondu par des mesures telles que des démolitions de maisons, des couvre-feux, des expulsions et des détentions administratives (emprisonnement sans procès ni inculpation), des formes de punition collective qui sont devenues des caractéristiques quotidiennes de l’occupation militaire. Après avoir occupé la Cisjordanie et la bande de Gaza en 1967, Israël a interdit tout symbole manifeste du nationalisme palestinien, y compris les drapeaux et les cartes.
En 1976, les élections municipales en Cisjordanie ont été remportées par des candidats nationalistes à la mairie, contre des opposants sélectionnés par l’administration militaire israélienne. En collaboration avec des journalistes, des organisateurs syndicaux et des dirigeants de groupes d’étudiants et de femmes, les nouveaux maires ont créé le Comité national d’orientation en 1978. Les principaux objectifs du CNO étaient de protester contre les Accords de Camp David entre l’Égypte et Israël, ainsi que contre tout accord sur la Palestine dans lequel les Palestiniens eux-mêmes n’étaient pas représentés. Des organes désignés ont été créés par Israël qui cherchaient à contrôler les Palestiniens dans les territoires occupés et, en réponse, les Palestiniens ont de nouveau exigé l’autodétermination. Une fois de plus, la protestation s’est exprimée par des grèves et des manifestations coordonnées et non violentes.
En quelques années, Israël a interdit le CNO, arrêta ou expulsa les principaux organisateurs et assigné à résidence la plupart des maires nationalistes qui n’avaient pas expulsé. En 1980, des extrémistes israéliens ont attaqué les maires de Ramallah et de Naplouse avec des voitures piégées, blessant gravement les deux. Les auteurs ont été condamnés à des peines de prison légères et certains ont finalement été acquittés de toutes les accusations. En 1982, les maires palestiniens ont été démis de leurs fonctions et remplacés par des personnes nommées par l’administration civile israélienne.
Au début des années 1980, toutes les factions de l’Organisation de libération de la Palestine avaient établi des structures de base dans toute la Cisjordanie et la Bande de Gaza. Les organisations bénévoles comprenaient des syndicats, des groupes d’étudiants et des groupes de femmes. Israël a attaqué les représentants de ces institutions, plaçant nombre d’entre eux en “détention administrative”, et les intimidations et humiliations de routine ont été étendues aux participants à ces organisations de masse.
Israël a également attaqué les défenseurs palestiniens de la résistance non violente. En 1983, par exemple, Moubarak Awad, parfois connu sous le nom de “Gandhi palestinien”, a créé le Centre Palestinien pour l’étude de la Non-violence. Il a écrit le plan de douze pages pour la résistance passive dans les territoires. En 1988, Israël a expulsé Awad pour incitation à un soulèvement civil.
Lorsque la Première intifada a éclaté en décembre 1987, la décision collective de s’abstenir de recourir à la violence (à l’exception des jets de pierres) était stratégique. Au cours des premières semaines d’agitation de masse coordonnée et de désobéissance civile, une série de comités populaires locaux ont été organisés dans toute la Cisjordanie et la bande de Gaza pour soutenir et renforcer l’Intifada. Les comités étaient chargés de tâches telles que la préparation aux situations d’urgence, la culture de l’autosuffisance (y compris l’éducation des enfants à la maison) afin de ne pas dépendre des autorités pro–israéliennes et des patrouilles de sécurité nocturnes, ainsi que l’organisation des activités quotidiennes de l’Intifada : grèves, manifestations, boycotts des produits israéliens et non-paiement des taxes.
En réponse, l’armée israélienne a confronté des manifestants non armés à des balles réelles, emprisonné ou expulsé des organisateurs, imposé des couvre-feux, coupé l’approvisionnement en eau, en électricité et en carburant, démoli des maisons, fermé des écoles pendant des mois et des universités pendant trois ans. Lorsqu’Israël et l’OLP ont signé la Déclaration de principes qui a lancé le Processus d’Oslo en septembre 1993, Israël avait tué plus de 1 700 Palestiniens (presque tous non armés) et emprisonné plus de 120 000 (selon les chiffres de B’Tselem). Aucune famille n’a été épargnée par la punition collective. 47 civils israéliens ont été tués pendant l’Intifada.
En 2005, la société civile palestinienne a appelé à une campagne de boycott, désinvestissement et sanctions (BDS) contre Israël jusqu’à ce qu’il se conforme au droit international et aux principes universels des droits de l’homme. Le mouvement non violent a acquis une popularité internationale considérable. Le Parlement israélien a adopté une loi draconienne en 2011 qui punirait tout Israélien qui boycotterait l’une de ses institutions ou entreprises économiques. Aux États-Unis, 38 États ont jusqu’à présent adopté une sorte de législation anti-BDS. En mars 2018, les Palestiniens de la bande de Gaza ont lancé la Grande Marche du Retour pour exiger la fin du blocus israélien et le droit au retour des réfugiés. Les manifestations étaient en grande partie non violentes, mais l’armée israélienne a ordonné que toute personne – y compris des manifestants non armés, des passants, des journalistes et du personnel médical – qui s’approcherait à quelques centaines de mètres de la barrière de séparation Israël-Gaza soit abattue. Selon les chiffres de l’ONU, au 22 mars 2019, Israël avait tué 195 Palestiniens (dont 41 enfants) et blessé environ 29 000 personnes.
Bien qu’ils fassent rarement la une des journaux internationaux, l’histoire palestinienne est jonchée d’épisodes de résistance non violente à l’occupation militaire israélienne. La réponse d’Israël a été habituellement disproportionnée et l’écrasante majorité des personnes blessées ou tuées ont été d’un seul côté, le côté qui n’a pas d’importance pour les gouvernements occidentaux. Entre 2009 et septembre 2023, Israël a tué six mille 407 Palestiniens et en a blessé 152 mille 560, contre 308 Israéliens tués et six mille 307 blessés par des Palestiniens (selon les chiffres de l’ONU).
En 2021, les actions provocatrices d’Israël seraient passées inaperçues de la communauté internationale sans le fait que le peuple palestinien a adopté une position collective, utilisant toutes les formes de résistance, de Sheikh Jarrah, à Jérusalem-Est, à Gaza. Tout l’épisode, qui a finalement conduit à une guerre israélienne contre Gaza en mai, a commencé par une tentative israélienne de routine de nettoyer ethniquement les Palestiniens de plusieurs quartiers de Jérusalem-Est, tels que Sheikh Jarrah et Silwan. La résistance populaire non violente à Sheikh Jarrah a été confrontée à une violence israélienne extrême, impliquant des colons armés, la police israélienne et les forces d’occupation, faisant au moins 178 blessés parmi les manifestants palestiniens le 7 mai. Les Palestiniens de tous les territoires occupés ont commencé à se mobiliser en solidarité avec leurs frères à Al Qods (Jérusalem en arabe), ce qui a déclenché une autre guerre israélienne dévastatrice contre la bande de Gaza le 10 mai. Le massacre de 2021 a entraîné la mort de plus de 250 Palestiniens, des milliers de blessés et des destructions massives.
Le 7 octobre 2023, le Hamas a tué 1 200 Israéliens. Depuis lors, Israël a tué un nombre indéterminé, pas moins de 13 000 Palestiniens (NDT : l’article original a été publié le 10 décembre 2023, aujourd’hui, avril 2024 il est de 33 000), pour la plupart des civils et plus d’un tiers des enfants, par des campagnes de bombardements aveugles et d’autres attaques de masse, en guise de punition collective pour des crimes qu’ils n’ont pas commis.
Pourquoi le chagrin incontestable causé par la mort de Juifs israéliens devrait-il être considéré comme sapant l’argument selon lequel l’oppression prolongée et de plus en plus misérable du peuple palestinien est le facteur clé de ce qui s’est déroulé, “si brutalement et inexcusablement” selon les mots des médias pro-capitalistes et pro-sionistes, le 7 octobre ? Et pourquoi toute tentative de comprendre l’histoire du Hamas dans le cadre d’un mouvement d’insurrection et de résistance contre l’occupation est-elle si facilement caractérisée sans jugement moral ? Lorsqu’António Guterres, le secrétaire général de l’ONU, a suggéré de replacer les événements du 7 octobre dans leur contexte historique et politique, il a immédiatement été accusé d’alimenter très largement l’antisémitisme. Un simple souffle de compréhension et il a été condamné.
Il était nécessaire de préciser que la résistance des Palestiniens contre l’occupation coloniale israélienne a été pour la plupart non violente et que la violence a été générée et continuera d’être générée par le contexte orwellien de la vie de deux millions de personnes retenues captives dans une “prison à ciel ouvert” qu’est la bande de Gaza aujourd’hui réduite en décombres. Tout cela s’étend à la Cisjordanie, à Jérusalem-Est et à tout autre territoire peuplé de Palestiniens.
Notes
1. Comme l’a dit Joseph Goebbels, “La propagande ne trompe pas les gens, elle les aide simplement à se tromper eux-mêmes.” Il peut sembler absurde que Joseph Goebbels soit considéré par divers chercheurs comme le père de la propagande politique moderne, mais ses onze principes de propagande dictent une série de ressources qui continuent d’être indiscutablement utilisées, telles que : si vous ne pouvez pas nier les mauvaises nouvelles, inventez-en d’autres qui les distraient ; les réponses de l’adversaire ne devraient jamais pouvoir contrer le niveau croissant d’accusations. La propagande devrait être limitée à un petit nombre d’idées et répétée inlassablement, mais toujours en convergeant sur le même concept, et un long Et cetera.
2. Le 27 mai 1942, les résistants tchèques Jozef Gabčík et Jan Kubiš ont attaqué Reinar Heydrich, le “protecteur nazi de la Bohême et de la Moravie”, décédé des suites de ses blessures le 4 juin. Enragé par l’exécution de Heydrich, Hitler ordonna une enquête rapide. Les services de renseignement ont faussement lié les assaillants aux villes de Lidice et Ležáky. Un rapport de la Gestapo a déclaré que Lidice, à 22 kilomètres au nord-ouest de Prague, était soupçonnée d’être la cachette des assaillants parce que plusieurs officiers de l’armée tchèque, alors en Angleterre, y étaient partis. De plus, la Gestapo avait trouvé un émetteur radio de résistance à Ležáky. Le 9 juin, dans le village de Lidice, 172 garçons et hommes âgés de 14 à 84 ans ont été abattus. Par la suite, tous les adultes de Ležáky ont été tués.
Toutes les femmes de Lidice sauf quatre ont été immédiatement déportées au camp de concentration de Ravensbrück (quatre étaient enceintes ; elles ont été soumises à des avortements forcés dans le même hôpital où Heydrich était décédé, puis les femmes ont été envoyées au camp de concentration). Certains enfants ont été choisis pour la germanisation et 81 ont été tués dans des camions à essence au camp d’extermination de Chelmno. Les deux villes ont été incendiées et les ruines de Lidice ont été rasées. Au total, au moins 1 300 Tchèques, dont 200 femmes, ont été tués en représailles au meurtre de Heydrich.
Toute ressemblance entre Hitler et Netanyahou n’est en aucun cas, comme ils le disaient dans les vieux films hollywoodiens, “une pure coïncidence.” À Lidice et à Gaza, l’attaque contre Reinhard Heydrich et l’absurde attaque du Hamas ne sont pas les causes, mais les prétextes pour déclencher le génocide. Gaza est devenu un leader multiplié par 100.
Traduction : Pour le droit du peuple palestinien et de sa Résistance à se défendre d’un génocide et à recourir à la lutte armée conformément à la résolution 3070 de l’ONU qui déclare : “Réaffirme la légitimité des peuples pour se libérer de la domination coloniale et étrangère par tout les moyens en leur pouvoir y compris la lutte armée”.
Autres exemples :
Bilin et Nilin
2009-2011
On peut aussi ajouter les manifestations hebdomadaires contre le mur de séparation par les habitants de Bilin et Nilin en Cisjordanie. Ces manifestations ont eu lieu quelques jusqu’en 2011 ( cf Israël retire des barbelés d’un village symbole de la lutte contre le “mur”) Au cours des années l’armée d’occupation israélienne a tué plusieurs manifestants, Wikipédia en mentionne dans sa page 2009 en Cisjordanie (utilisez la touche Ctrl + f pour rechercher avec les mots clef Bilin Nilin). Amnesty International mentionne un peu l’affaire dans ce communiqué UN MILITANT EMPRISONNÉ POUR AVOIR MANIFESTÉ PACIFIQUEMENT.
6 ONG palestiniennes interdites
2021
En 2021 l’occupant sioniste a interdit 6 ONG palestinienne les qualitatifs de “terroristes”. Il s’agit des organisations suivantes : Addameer (droits des prisonniers politiques), Al-Haq (droits humains – membre de la FIDH), DCI-P (organisation internationale de défense des enfants – Palestine), UAWC (l’union des comités agricoles), l’Union des Comités de Femmes palestiniennes, et le centre Bisan de recherche et développement.
Au passage Israël a déporté vers la France l’avocat franco-palestinien Salah Hamouri, ancien prisonnier politique et travaillant pour l’organisation Addameer (droits des prisonniers politiques) et désormais victime d’épuration ethnique.
Source : Six ONG palestiniennes de défense des droits humains – Lettre au Président de la République