C’est officiel. Depuis le 1er février 2025, en Norvège, aucun animal ne peut désormais être élevé pour sa fourrure. L’entrée en vigueur de la loi scandinave, initiée par un vote du parlement en 2019, est intervenue dans un contexte général de diminution de la production de fourrure en Europe et ailleurs dans le monde. Une « très bonne nouvelle », se réjouissent les associations de protection du bien-être animal qui mènent un combat politique sans relâche pour mettre fin à ces pratiques cruelles et polluantes.
Chaque année, environ 100 millions d’animaux sont élevés et tués pour leur fourrure dans le monde, estime One Voice, une association française de protection des animaux.
Seuls ou entassés à plusieurs dans des cages réduites, ce sont principalement des visons, renards, chinchillas et lapins, « qui attendent la mort, cloîtrés, dans le plus complet déni de leurs besoins. La rentabilité passe avant tout », se désole l’organisation.
Un marché en plein déclin
« Dans les années 40, la Norvège était leader sur le marché de la production de fourrure ».
Depuis le 1er février 2025, ce n’est définitivement plus une réalité en Norvège, pays qui occupait dans les années 40 la place de leader sur le marché de la production de fourrure.
En 2019, lors du vote de la loi officiellement promulguée en 2025, le pays comptait toujours 250 fermes sur son territoire, exploitant au total 610 000 visons et 150 000 renards pour leur fourrure. À l’échelle mondiale, la Norvège produisait alors environ 1% des peaux de vison et entre 2 et 3% des peaux de renard.

Près de l’intégralité de cette production était destinée à l’export (99%), à destination principalement de la Russie et de la Chine, où l’augmentation du niveau de vie avait ravivé l’intérêt des citoyens pour les précieuses étoles.
En Europe, les campagnes de sensibilisation et l’attrait des consommateurs pour des modes de vie plus « responsables » ont sonné le déclin de toute l’industrie depuis deux décennies. Entre 2011 et 2021, les importations de fourrure sont ainsi passées d’environ 318,8 millions d’euros à 107,8 millions d’euros.
La production a également fortement diminué : « alors qu’elle était encore d’environ 38 millions de fourrures en 2018, elle est tombée à environ 11 millions en 2021 », rapporte l’organisation de défense animale Quatres Pattes. En 2023, l’Union européenne n’abritait plus qu’un petit millier d’exploitations.
Grande victoire pour les associations de défense animale
Une victoire sur les mentalités obtenue après un long combat pour les associations du secteur. « Une décennie de campagnes ciblées, révélant les sombres réalités du commerce de la fourrure tout en soulignant l’appétit croissant des consommateurs pour des produits éthiques, a changé la donne », se félicite la Fur Free Alliance, une coalition de plus de 50 groupes de protection animale du monde entier luttant contre l’industrie de la fourrure.
« Les marques de mode d’aujourd’hui reconnaissent que le luxe n’est plus synonyme de cruauté et donnent la priorité aux politiques de bien-être animal et aux alternatives innovantes ».
Si près de 1600 marques tels que Gucci, Armani ou Michael Kors ont publiquement abandonné la fourrure animale après avoir travaillé avec le réseau, de nombreuses victoires politiques marquent également l’engagement des citoyens et associations.
« En plus de 25 ans d’existence, le réseau a contribué à ce que plus de 25 pays aient adopté des lois interdisant ou limitant la production de fourrure sur la base du bien-être animal et de la moralité publique. Le travail se poursuit dans plusieurs pays où des propositions d’interdiction de l’élevage d’animaux à fourrure sont à l’étude », explique l’organisation.
Tour à tour, les pays européens s’engagent en faveur du bien-être animal
Le Royaume-Uni, un leader en matière de droits des animaux, est ainsi devenu le premier pays européen à interdire l’élevage d’animaux à fourrure pour des raisons éthiques en 2003, rapidement suivi par l’Autriche en 2004.

Suite à l’apparition de foyers de COVID-19 dans des élevages et aux risques élevés de propagation mis en avant par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), les Pays-Bas et le Danemark ont également mis fin à leur production.
Pour la Fur Free Alliance, « il est clair que le vent tourne contre l’élevage d’animaux à fourrure, car les défenseurs des animaux continuent de faire pression pour obtenir des lois prohibitives afin de protéger le bien-être animal, la santé publique et l’environnement ». Et pour cause : au-delà de la cruauté évidente d’un tel commerce, l’élevage d’animaux à fourrure représente également un poids écologique non négligeable.
« Grandes productrices de lisiers azotés et phosphorés de ces animaux carnivores, les « fermes à fourrure » polluent eaux de surface et nappes phréatiques, et libèrent de grandes quantités d’ammoniac, d’oxyde d’azote et de méthane »
En outre, le traitement des peaux requiert également nombre de produits toxiques pour les travailleurs de l’industrie et l’environnement.
Vers une interdiction totale à l’échelle européenne ?
En 2021, Israël est devenu le premier pays au monde à interdire totalement la vente de fourrure. Aux États-Unis, certaines villes et certains États ont imposé leurs propres interdictions, notamment la Californie, le Connecticut ou encore Hawaii.
À l’échelle européenne, si l’importation et le commerce de peaux de phoques, de fourrures de chiens et de chats sont interdits depuis 2009, la vente de fourrure en général reste légale sur le territoire. En mai 2022, l’initiative citoyenne « Une Europe sans fourrure », portée par les associations du secteur, avait récolté plus de 1 500 000 signatures.
« Même si le commerce de la fourrure est en déclin, le travail est loin d’être terminé : la souffrance de 20 millions d’animaux chaque année reste 20 millions de trop. »
« En continuant à demander des comptes aux marques et en plaidant pour un changement législatif, nous pouvons garantir des progrès plus significatifs vers l’élimination définitive du commerce mondial de la fourrure », conclut Fur Free Alliance, déterminée à poursuivre le combat.
– Lou Aendekerk
Photo de couverture : Un Vison d’Europe (Mustela lutreola) au Zoo Osnabrück. Wikimedia